Space Roar est une installation vidéo interactive. Elle met en scène, sur un mode contemplatif et monumental, l’évasion de l’humanité à bord de flottes gigantesques de vaisseaux errant dans l’espace. Chaque ensemble de vaisseaux représente une partie de la population terrestre.
« Ce n’est pas arrivé soudainement. La terre rugit depuis longtemps. Selon certains, elle a commencé avec la naissance de l’humain de trop. Mais peu importe, l’humanité fait comme toujours : elle fuit. Elle fuit vers le rugissement de l’espace ».
Space Roar c’est de la Science-Fiction. Mais comme toute bonne science-fiction, le projet est enraciné dans la science : la Terre est en train de mourir. La communauté scientifique a récemment statué que le réchauffement climatique a dépassé le point de non-retour. Il ne s’agit pas de savoir si toute la vie sur Terre prendra fin, mais quand cela arrivera. Il est particulièrement important de souligner cette réalité de nos jours étant donné que les scientifiques « alternatifs » tentent irrationnellement de le nier. Pour survivre, l’humanité doit entreprendre un long voyage, la Grande Traversée, pour coloniser un nouveau monde. Le projet est constitué en quatre parties qui utilisent différents types de médias : une projection audiovisuelle générative, un livre à colorier, une vidéo et une application interactive. Le tout offre une interprétation poétique des événements cataclysmiques et une certaine beauté de la tragédie. Le projet représente, d’une manière contemplative et monumentale, l’évasion de l’humanité à bord d’une gigantesque flotte de navires traversant le rugissement de l’espace vers le système trappiste-1. Plus de 7000 navires transportant 100000 humains chacun, offrent le salut pour un dixième de la population de chacun des pays de la Terre. Comme cette grande traversée est très longue, 800023 ans avec la technologie actuelle, chaque navire est adapté pour représenter les conditions de son pays. Par exemple, il existe un grand nombre de navires indiens qui composent la flotte, car la population de l’Inde est élevée, mais leurs navires sont très petits, car la population y est très dense. D’autre part, les vaisseaux pour le Canada sont très grands et peu nombreux, car le Canada n’est pas densément peuplé et ses citoyens sont peu nombreux et habitués à plus d’espace. Chaque vaisseau est généré à partir des statistiques géographiques et sociopolitiques d’un pays qui sont par la suite converties en une sorte de code ADN. Ce code ADN, constitué des lettres A à Z, représente le classement de ce pays à propos des données suivantes : population, densité de population, indice GINI (équité), production nucléaire en Kwh, production de CO2, armes et capacité de production. L’ADN est ensuite transmis à un algorithme qui construit un vaisseau unique en fonction de ces données. Des densités de population plus élevées produiront des navires plus petits, alors qu’un faible score GINI créera des navires plus longs (les riches ne veulent pas rester dans les mêmes quartiers que les pauvres). Le CO2 produit des débris, et la capacité de produire résulte en la construction de vaisseaux plus élaborés. Chaque nation est représentée par un modèle 3D différent construit avec cet ADN. Les principes de base de l’algorithme de construction sont inspirés d’un projet open source de Dolf Veenvliet. Les pièces de base qui forment les vaisseaux sont puisées de la collection Shipyard V0.7 de greyoxide (http://www.blendswap.com/blends/view/17601).
LE LIVRE À COLORIER
Le livre à colorier est un artefact de notre avenir. C’est un livre tangible intitulé Un livre à colorier pour la fin du monde. Le livre a été créé pour préparer les enfants voyageurs à la Grande Traversée et pour les familiariser avec les différents navires qui peupleront la vue des hublots. Le livre présente 34 navires, leur ADN, leur quantité et les statistiques utilisées pour leur création. Le livre est une réponse dérisoire à la gamification et l’amusement constamment exigé par les subventionneurs des arts numériques et interactifs.
NOTE TECHNIQUE
Space Roar est vendue sous forme de logiciel PC qui génère la vidéo à l’infini (et pour laquelle donc il n’y a pas de durée). Une licence est donnée pour l’impression du livre à colorier tant qu’il est distribué en lien avec l’installation. L’œuvre inclut aussi un exemplaire d’un livre à couverture rigide de 247 pages qui présente tous les vaisseaux.
LA PROJECTION GÉNÉRATIVE
Le voyage de ces 7000 navires est simulé par une projection générative où le contenu est créé dynamiquement par le système et peut jouer sans fin. Les éléments visuels et sonores sont inspirés par les films de science-fiction et plus précisément, le début du film Spaceballs (https://youtu.be/1dZveoBfiww) où un vaisseau spatial ridiculement long croise lentement l’écran pendant 90 secondes, et par tous les films qui présentent une romantisation du voyage et des batailles dans l’espace où le vrombissement des roquettes spatiales fait vibrer les sièges du cinéma. L’artiste a voulu reproduire ces éléments dans une sorte de « Science-Fiction Porn », un spectacle constitué à 100% de vaisseaux rugissants le 100% du temps. Le rugissement des roquettes sur chaque navire a été créé en échantillonnant les bruits de moteur de divers films (Star Trek, Star Wars, Battlestar Galactica, etc.). Ces échantillons sont positionnés dans l’espace et exploitent généreusement l’effet Doppler pour donner une expérience immersive où le spectateur ressent vraiment les navires qui passent. Les données de simulation sont compilées sur un serveur persistant dans le Nuage. Toute la flotte est répartie dans un cube virtuel de 10000 kilomètres cubes. L’entièreté de la flotte n’est donc jamais complètement visible car elle est trop grande. Ainsi, le système décide régulièrement d’échantillonner un espace plus petit de 2000 km3 et d’afficher uniquement les navires qui s’y trouvent. Le mouvement des vaisseaux est déterminé par un algorithme de simulation de volée qui tente de créer une masse cohésive. La caméra virtuelle se déplace dans cette masse de manière semi-aléatoire mais surtout cinématographique, en se concentrant sur certains vaisseaux tout en essayant de fournir une expérience visuelle et sonore intéressante. L’étoile Trappist-1 est toujours visible à l’écran car elle représente la destination finale du convoi.